En ces jours où nous célébrerons la croix, n’oublions pas qu’à l’origine la croix est un instrument de supplice, un instrument de souffrance et de mort. Alors comment les chrétiens ont-ils pu la choisir comme symbole de leur foi ? Surtout que la croix n’est pas simplement le logo des chrétiens si j’ose dire, elle est présente dans toute la vie chrétienne. Elle est le premier geste fait sur l’enfant que l’on baptise, croix sur le front. Nous la traçons sur notre corps au début et fin de chacune de nos prières. Elle est tracée sur nous à chaque bénédiction. Elle préside dans le chœur de nos églises. Elle est accrochée aux murs de nos maisons, elle est plantée aux croisées de nos chemins, et sur nos montagnes, et nous la portons même en bijoux autour de notre cou.
Elle a une telle place dans notre vie chrétienne parce qu’elle est le résumé de notre foi. En elle tout est dit. La croix exprime à elle seule le Kérygme, c’est-à-dire le cœur même de la foi chrétienne, que nous célébrons tout particulièrement durant la semaine sainte, le fait que Jésus est mort pour nous sur la croix, qu’il est ressuscité, pour nous sauver.
La croix nous dit l’amour infini, absolu, inimaginable de Dieu qui a accepté de mourir dans des souffrances atroces, simplement par pur amour, pour porter en sa chair toute la souffrance de l’humanité et vaincre en lui la mort. Le Cardinal Walter Karper a magnifiquement exprimé cela en écrivant : « Dieu va à l’opposé de ce qu’il est, il prend sur lui la mort et se soumet aux puissances de la mort. Dieu lui-même est mort. Et pourtant la mort ne pouvait retenir Dieu qui est immortel. La mort a pour ainsi dire été enterrée sur la croix. La mort de Jésus sur la croix signifie donc la mort de la mort et la victoire de la vie. »
Ce que nous vénérons à travers la croix c’est cela, l’amour totalement gratuit de Dieu qui l’a conduit à donner sa vie pour nous.
Dieu se révèle à nous sur la croix dans sa toute puissance d’amour. Mais nous ne pouvons comprendre la croix qu’en voyant en elle aussi l’annonce de la résurrection. L’un ne va pas sans l’autre. La mort de Jésus n’a de sens qu’au matin de pâque.
C’est la résurrection qui nous donne de comprendre que la mort est vaincu et que nous sommes tous appelés à partager un jour la vie de Dieu, d’être avec lui, dans sa vie pour l’éternité. Par la croix, rappel de la mort et résurrection de Jésus, notre vie prend sens, elle est orientée vers Dieu et sa vie de gloire, de joie et de paix absolue.
La croix que nous traçons sur nous, nous invite aussi à vivre en disciple de Jésus, c’est-à-dire en donnant nous aussi notre vie pour nos frères et sœurs. Cet amour infini dont elle est le signe est une force de don de soi.
Tout au long de sa vie publique Jésus a combattu la souffrance sous toute ses formes, il a guéri des malades, des aveugles, des paralytiques. Il a rendu leur dignités et leur statut d’humain à tous les pauvres et les exclus. Il a consolé et réconfortés tous ceux qui croisaient son chemin. Par la croix il nous demande de nous donner tout entier dans le service de nos frères et sœurs pour soulager toutes souffrances. Nous ne pouvons vénérer la croix et ne pas nous engager a faire reculer, autant qu’il nous est possible, la souffrance autour de nous est dans le monde.
La croix nous offre le signe de l’amour de Dieu pour nous, notre attachement à lui, notre volonté de le servir et de l’aimer et elle nous engage envers nos semblables dans un service, un don de soi, à la suite et à l’exemple du Christ.