Vous avez surement, comme moi, été atterrés par les chiffres du compte rendu de la commission Sauvé sur les abus sexuel dans l’Église. Le nombre effrayant de victimes depuis 1950, la négligence, le refus de voir et d’entendre, le silence, la mise en danger d’enfants de la part des responsables de notre Église.
L’effroi, l’accablement, et surtout la honte nous submerge.
Nous sommes effondrés en pensant à toutes ces personnes dont la vie a été rendue douloureuse, difficile quand elle n’a pas été brisée. Nous les portons dans la prière et nous devrons leur apporter notre écoute bienveillante et notre soutient.
J’espère que les évêques vont mettre en œuvre les préconisations de cette commission, que ce soit pour l’indemnisation des victimes, les changements du droit, de la gouvernance, de la formation des prêtres et la place des femmes dans l’Église.
Mais je crois que ce rapport accablant invite avant tout notre Église à plus d’humilité. Il faudra désormais qu’elle se situe dans le monde comme pécheresse au milieu des pécheurs. Elle devra se reconnaitre dans le monde, même si elle n’est pas du monde, c’est-à-dire non pas au dessus, non pas en face, mais bien au cœur du monde. Sa parole, surtout sur les sujets de morale, devra tenir compte qu’elle est aux yeux de tous l’institution entachée par cette infamie.
La honte qui est la notre aujourd’hui doit nous apprendre à nous adresser à nos frères et sœurs avec bien plus d’humilité, de compréhension, de solidarité dans la faiblesse, dans la reconnaissance de notre propre péché. L’Église qui a trahie son propre enseignement et sa mission ne pourra que se faire plus accueillante, bienveillante, compréhensive, miséricordieuse pour tous ceux et celles qui ne sont pas totalement en phase avec sa morale.
De plus, comme nous y invite le pape François, il est temps de combattre au sein de l’Église tout cléricalisme. Le prêtre est un baptisé comme les autres qui a reçu la mission du service d’une communauté pour l’annonce de l’Évangile, la célébration des sacrements et son unité. Il ne doit jamais être perçu ou estimé comme supérieur à qui que ce soit et en quoi que ce soit. C’est à nous tous d’y veiller, prêtres et laïcs. Peut être est-il temps de bannir de notre vocabulaire les termes de « Père, Abbé, curé » qui marquent une différence ou une déférence particulière, pour ne garder que celui de « frère » ou de « prêtre au service de… ». Ne faut-il pas éviter tout ce qui peut signifier une mise à part et une autorité particulière qui peut se transformer en sentiment de toute puissance et d’impunité ?
Frères et sœurs en Christ, je ne vous demande pas de vous méfier de nous, nous ne sommes pas tous des criminels, mais je vous demande de vous adresser à nous comme à n’importe quel baptisé, dans un esprit d’égalité et de fraternité. « Baptisés avec vous et prêtres pour vous. »
Que Dieu nous donne la force de vivre notre foi et notre vie chrétienne ensemble, dans la communion au Christ, conscients du péché de notre Église mais confiant en l’œuvre de l’Esprit Saint dans le monde et dans son Église. Que Dieu nous fasse la grâce de l’humilité de son Fils né dans une étable et mort sur la croix.
Très fraternellement
Jean-Luc Barrié