Quand Luc écrit cet évangile il a visiblement le désir de répondre à une question qui hante l’esprit des chrétiens à qui il s’adresse, une question qui était celle aussi des apôtres aux premiers jours de Pâque. Cette question est évoquée au début de l’Evangile : « Saisis de frayeur et de crainte, ils croyaient voir un esprit. » Nous dit Luc.
Quand les apôtres ont vu Jésus ressuscité qu’ont-ils vu véritablement ? un esprit ? un fantôme ? une vision imaginaire ? une hallucination collective ?
Pour beaucoup cela était concevable, mais que Jésus soit ressuscité avec son corps, cela c’était impossible, inimaginable.
St Luc va répondre à cette question, en essayant de donner un maximum d’éléments qui nous permettent de comprendre que Jésus ressuscité n’est pas un esprit ou un fantôme.
Jésus invite les apôtres de façon claire : “Voyez mes mains et mes pieds : c’est bien moi !” Ce qui veut dire c’est moi qui ait été crucifié pas un autre, c’est bien moi qui suis mort sur la croix et que vous voyez vivant aujourd’hui.
Jésus insiste : “Touchez-moi, regardez : un esprit n’a pas de chair ni d’os comme vous constatez que j’en ai” Et pour appuyer ses paroles il va demander qu’on lui donne quelque chose à manger. Oui, Jésus est bien ressuscité avec son corps.
Même pour nous aujourd’hui une telle affirmation est difficile à croire.
Après tout pourquoi seul son esprit ne serait-il pas vivant ? Qu’est-ce que ça changerait ?
En fait il nous est dit que c’est tout Jésus qui est passé par la mort et qui est ressuscité. Jésus vivant après sa mort est bien lui-même, tout lui-même et pas seulement son esprit, son âme, son image, ou sa mémoire.
Pourquoi cette insistance sur le corps ? Le corps est ce par quoi nous sommes des êtres de relation, c’est ce par quoi nous sommes des êtres d’amour.
Nous avons besoin de nos yeux pour voir nos frères, leurs attentes, leurs besoins. Nous avons besoin de nos oreilles pour les écouter. Nous avons besoin de notre bouche pour leur parler, leur dire notre amour, pour les embrasser. Nous avons besoin de nos mains pour serrer celles de nos frères humains, pour travailler, pour partager, pour caresser.
C’est par notre corps que nous sommes des êtres de relation, des êtres d’amour.
A notre mort c’est tout notre être qui ressuscite, c’est tout notre être de relation et d’amour. C’est tout l’amour dont nous sommes porteur qui rejoint, qui entre dans l’Amour infini et parfait de Dieu.
Jésus qui n’a été qu’amour, dont le corps n’a été qu’amour ( il n’y avait en lui aucune trace de péché ), Jésus va ressusciter avec la totalité de son être charnel.
Nous mêmes, êtres de relation et d’amour nous ressusciterons avec ce qui a été l’instrument de notre amour c’est à dire notre corps. Un corps que St Paul 1Cor 15, 44 appelle “corps spirituel” pour nous expliquer que, bien sûr, il ne sera pas tout à fait le même que celui dont nous mesurons tout les jours les limites. Notre corps sera purifié de tout égoïsme, de toute imperfection, de toute finitude pour entrer dans l’infini et la perfection de Dieu.
l’Evangile de ce jour ce termine par cette phrase de Jésus : ” A vous d’en être les témoins” Elle s’adresse à nous aussi. Jésus nous invite à être les témoins de sa résurrection.
Et puisque notre corps est notre instrument de relation et d’amour, c’est avec tout notre corps que nous devons témoigner. Avec nos yeux capables de voir les besoins de nos frères, nos oreilles pour les écouter, avec notre bouche pour leur annoncer clairement l’espérance qui nous anime, avec nos mains dans un partage, une entraide, une tendresse.
Dans sa résurrection Jésus nous dit que notre corps n’est pas méprisable, bien au contraire, il a à ses yeux une immense valeur. A nous de le respecter, de le soigner, de le préserver pour le mettre tout entier au service de son amour.