Quand Jésus appelle ses disciples à le suivre, Marc nous dit que Simon et André « Aussitôt, laissant leurs filets, ils le suivirent » et pour Jacques et Jean « laissant dans leur barque leur père Zébédée avec ses ouvriers, ils partirent à sa suite ». Il semble clair dans l’esprit de l’évangéliste que pour suivre Jésus, pour devenir son disciple, il faut laisser des choses, et même des choses importantes pour nous.
Cette notion d’abandon me parait intéressante à méditer alors que nous arrivons à la clôture de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens.
L’unité des chrétiens c’est bien évidement le désir de voir réunir les frères orthodoxes, protestants et catholiques. Cette division du Corps du Christ est une souffrance qui ne peut nous laisser indifférent. Et nous ne pouvons que désirer ardemment, prier et faire notre possible pour que l’unité soit atteinte un jour. Mais comme dit l’adage « si tu veux changer le monde, commence par changer ton cœur » pour que l’unité entre Églises puisse se faire il faut aussi que nous veillons à l’unité de notre propre Église et en premier de notre communauté locale.
Pour nous éclairer sur ce chemin je voudrais vous partager ce que Dom Samuel, père abbé cistercien, écrit dans un livre récent sur le sujet. La recherche de l’unité au sein de sa communauté monastique l’amène à une réflexion très intéressante, entre autre, sur la vérité.
Il écrit « Chercher inlassablement la vérité en s’efforçant de recevoir la Vérité, sans jamais prétendre avec suffisance avoir sûrement raison ». En d’autres mots, il distingue la Vérité avec un V majuscule, qui est Jésus lui-même « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie », et la vérité que nous cherchons et pouvons parfois atteindre mais qui n’est qu’une partie, un reflet, une miette de la Vérité entière, totale qu’est le Christ. Le problème est souvent que nous défendons notre part de vérité comme si elle était la Vérité toute entière. Et nous n’entendons plus ou refusons d’entendre la part de vérité que notre frère ou notre adversaire porte en lui.
Il nous faut donc, pour construire l’unité, renoncer, non pas notre vérité, mais de la vouloir absolue et vouloir l’imposer aux autres.
Dom Samuel écrit aussi « Croire en l’Église et aimer l’Église, serait-ce devenir capable d’entendre les autres quand ils disent quelque chose de vrai (même si ce n’est jamais la Vérité toute entière) et, sur un autre registre, de prendre sur soi le mal qui leur échappe (même s’ils désirent, au fond d’eux-mêmes, faire le bien.) ? » Construire l’unité c’est donc ne jamais séparer vérité et charité. C’est renoncer à avoir raison tout seul, c’est accepter et entendre la vérité que porte l’autre et en même temps faire preuve de miséricorde pour ses erreurs. Il n’y a pas d’unité possible dans le jugement, dans l’accusation, dans le soupçon. Seule la miséricorde est ferment d’unité.
Dom Samuel nous dit encore « La clé d’une vie vraiment chrétienne se trouve là : se considérer mutuellement comme des pécheurs assoiffés de salut, comme des malades en quête d’un médecin, avec des ministres qui portent dans des vases d’argile les onguents capables de guérir toute plaie. »
Nous sommes tous pécheurs, tous malades, ne faisant pas le bien que nous voudrions faire et faisant le mal que nous ne voudrions pas faire, comme le dit St Paul. C’est en nous reconnaissant nous même pécheur que nous pouvons entrer en dialogue avec ceux avec qui nous ne sommes pas d’accord, dans une attitude miséricordieuse pour leurs propres faiblesses et attentifs et à l’écoute de la vérité dont ils sont porteurs.
J’ai conscience que c’est plus facile à dire qu’à faire, j’en ai d’autant plus conscience que je sais les difficultés que j’ai moi même à le mettre en pratique. Mais avec l’aide du Seigneur nous sommes invités à avancer sur ce chemin de l’unité avec confiance et persévérance.