L’évangéliste Matthieu nous donne à entendre le récit de la multiplication des pains. Une phrase nous dit clairement que cet épisode de la vie de Jésus et de ses disciples nous parle aussi du sacrement de l’Eucharistie : « il prit les cinq pains et les deux poissons, et, levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction ; il rompit les pains, il les donna aux disciples, » Nous reconnaissons sans mal la prière que nous entendons à chaque eucharistie et qui fait mémoire des gestes et des paroles de Jésus lors de son dernier repas avec ses apôtres.
Mais dans cette multiplication de pain, ou dans la manière dont Matthieu nous la raconte, il y a d’autres allusions au sacrement.
Jésus répond aux disciples qui lui demandent de renvoyer la foule pour qu’ils aillent s’acheter à manger, en leur disant : « Donnez-leur vous-mêmes à manger. » L’eucharistie n’est pas une table de restaurant où l’on viendrait consommer du divin, où l’on viendrait prendre sa sucrerie spirituelle pour son plaisir ou même sa bonne santé spirituelle. L’on vient à l’eucharistie en y portant toute la vie de la semaine, tous les partages vécus, les solidarités, les aides, tout l’amour donné et reçu. Ce sont nos cinq pains et deux poissons » dont Jésus nous dit « Apportez-les moi. ». Il faut que notre existence toute entière soit eucharistie, qu’elle soit don d’amour et de vie et c’est tout le sens du rituel de la présentation des offrandes qui nous invite à offrir tout cela au Seigneur pour qu’elles deviennent Corps et Sang du Christ.
Jésus donne les pains aux apôtres leur demandant de les apporter à la foule. Le prêtre n’est pas celui qui « fait » le corps du Christ, il n’est que le serviteur de la prière de la communauté, celui qui préside l’eucharistie célébrée par tous dans une communion qui doit être vécue dès le début de la célébration. Nous devons faire corps (Eglise), avant de pouvoir communier au Corps du Christ.
On ne vient pas à la messe pour soi, mais pour devenir Église, pour faire Église, avec tous ceux qui sont là, ceux qui n’ont pas pu venir, et même ceux qui n’ont pas voulu venir. La communion au même corps nous oblige à faire communion entre nous, à dépasser nos divisions et nos différences pour devenir réellement des frères.
« Ils mangèrent tous et ils furent rassasiés. » dans l’eucharistie nous sommes rassasiés de l’Amour de Dieu, de sa Vie, de sa Joie. En sortant de l’église, tout à l’heure, demandons nous si nous sommes réellement rassasiés ? Si la réponse est non c’est que nous n’avons pas pris conscience de la merveille qui nous est offerte et qu’une fois de plus nous sommes venu par habitude, nous avons consommés du religieux, sans entrer vraiment dans la grandeur et la magnificence de se sacrement. L’eucharistie mérite que nous nous y préparions que nous la vivions pleinement.
Enfin Matthieu nous dit qu’il restait douze paniers pleins. S’il en reste c’est qu’il y en a pour ceux qui ne sont pas là. Si nous sommes rassasiés de l’Amour et de la Vie de Dieu dans l’eucharistie, ce n’est pas pour nous même mais pour que nous puissions porter les restes à nos frères et sœurs qui ne sont pas là. Cela ne veut pas dire de les inviter à venir dimanche prochain à la messe, nous ne leur portons pas une invitation, nous leur portons l’eucharistie elle-même. C’est-à-dire que nous leur apportons l’Amour infini de Dieu, sa joie et sa paix, son projet de vie et de bonheur. Par nos paroles, nos attitudes, nos actes nous leur portons l’amour et la tendresse divine. Toute eucharistie est célébrée pour l’humanité toute entière. Et nous qui avons le privilège d’y participer en devenons les porteurs, les messagers, les ministres auprès de nos contemporains.
Nous comprenons que ce sacrement n’est pas l’affaire de 45 ou 50 minutes le dimanche mais bien de tous les instants, c’est toute notre vie qui doit être Eucharistie. Que Dieu nous en donne la grâce.