Cet évangile a vraiment de quoi nous étonner, nous laisser perplexe. Au début Jésus nous dit : « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et n’y parviendront pas. » et à la fin il nous dit que «l’on viendra de l’orient et de l’occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le royaume de Dieu »
Ce qui laisse sous-entendre qu’il y aura du monde !
Il y aura du monde ou peu d’élus ? La réponse à priori n’est pas très claire.
Il faut dire que la question qui lui était posée : « n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? » peut être lue de deux façons. Elle peut révéler une inquiétude de ne pas faire soi-même partie du lot, mais elle peut signifier aussi vouloir être rassuré de bien être membre d’une petite élite de sauvés.
Les hommes et femmes à qui s’adresse Jésus ont conscience d’être le peuple élu, choisi par Dieu. Pour beaucoup en Israël, eux seuls sont sauvés parce qu’étant de ce peuple.
Jésus met à mal leur certitude et peut être aussi ce péché d’orgueil.
« Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite,»
Il ne suffit plus d’être issu d’un peuple d’Israël pour être sauvé, il faut aussi entrer dans la dynamique d’amour et de don de soi, de conversion du Royaume de Dieu.
Et cette porte étroite est aussi empruntée par des hommes et des femmes qui ne sont pas issus du peuple juif. Des quatre coins du monde ils ont marché à la suite du Christ sur ce chemin du royaume qui les conduit au salut.
Voilà qui nous invite nous aussi, peut-être, à corriger notre regard sur nos sœurs et nos frères.
Nous sommes parfois si bien entre nous, dans nos communautés chrétiennes, que nous risquons d’oublier le grand nombre, la multitude de ceux qui cherchent Dieu, de ceux qui vivent, parfois même sans en avoir conscience, le commandement de l’amour d’une manière tellement plus parfaite que nous.
Ils viendront du nord, du sud, de l’orient et de l’occident.
Parmi les hommes de toute langue, de toute nationalité, de toute religion, de toute pensée, il y a une foule immense d’amis de Dieu qui passeront devant nous à l’heure d’entrer dans la maison du Père pour la fête éternelle. C’est ce que nous dit Jésus dans cet évangile.
« Des premiers seront derniers » Des derniers à nos yeux, sont déjà premiers dans le cœur de Dieu.
Nous sommes appelés, me semble-t-il à être plus attentifs aux parentés secrètes qui nous unissent à tous ceux qui font le bien en dehors de notre Église et sans nous, qui cherchent Dieu et le vénèrent avec d’autres moyens que nous, d’une façon différente. L’Esprit Saint agit au-delà des limites de l’Église institution telle que nous la concevons trop souvent. L’amour de Dieu est sans exclusive et son regard sur les femmes et hommes de ce temps n’est peut-être pas le notre.
Mais pour nous aussi la porte est étroite. Il ne nous faudrait pas croire qu’il nous suffit d’être de ceux qui « mangeons et buvons en sa présence… » Il nous faut passer par la porte étroite, par l’exigence de l’amour universel de Dieu pour tous, un amour vécu en acte et en vérité.
Demandons à Dieu d’ouvrir nos yeux à la multitude de ceux qui le cherchent et le servent à travers le monde, à la multitude de ceux qui vivent de son amour autour d’eux sans toujours le savoir. Que Dieu nous donne assez d’humilité pour les reconnaître et les estimer comme des sœurs et des frères. Qu’il nous donne la force de nous-même le suivre sur ce chemin du salut qu’est le chemin de sa miséricorde et de sa tendresse.