“Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés.”

« Je vous appelle mes amis, » ces mots de Jésus me ramènent à mes débuts dans le ministère à Decazeville. Des ados s’étaient préparés à la confirmation et avaient réalisé des affiches pour affirmer leur foi. L’un d’eux avait écrit en grosses lettres « Jésus : mon meilleur ami ». Cela me semblait beau et juste mais un paroissien n’avait pas la même lecture que moi et m’a dit « c’est inadmissible de laisser écrire une chose pareille, Dieu , l’Éternel, ne peut être notre ami, nous ne pouvons le réduire à une relation d’amitié. »

Je comprends la réflexion de ce croyant, soucieux d’enseigner aux enfants la transcendance divine, mais je crois qu’il n’avait pas pris la dimension, la portée de cette phrase de Jésus : « je vous appelle mes amis, ».
Car c’est Dieu lui-même, lui l’Éternel, l’Absolue, qui veut entrer en amitié avec nous tous. L’Ancien Testament témoigne de ce désir de Dieu. Sans se lasser il revient vers l’homme pour lui proposer son Alliance, c’est-à-dire cette amitié, l’invitant à la partager dans la fidélité et la persévérance pour sa plus grande joie et pour son salut. Car c’est bien dans cette amitié que se trouve notre salut.
Au sein d’une famille nous ne choisissons pas nos frères et sœurs, nous faisons le choix de les aimer, le choix d’entrer en amitié avec eux. Et c’est ce choix qui fonde et fortifie notre fraternité.
Et comme l’a écrit Adrien Candiard dominicain, « Je suis frère de quelqu’un parce que nous ne pouvons pas faire comme si nous n’existions pas l’un pour l’autre. »
Cette amitié que nous propose Dieu nous ouvre à l’amitié avec nos frères et sœurs en humanité. Et cela relève effectivement d’un choix personnel d’où le commandement d’amour alors que pour nous l’amour ne se commande pas. Il ne suffit pas de se reconnaitre fils et filles d’un même Père, habitant sur une même terre-mère, il nous faut choisir d’entrer en amitié les uns avec les autres. Et nous savons combien, si cela peut être facile avec certains, cela peut être bien plus difficile avec d’autre, au point de nous sembler même impossible.
Comme nous le dit St Jean dans la première lecture, « aimons-nous les uns les autres, puisque l’amour vient de Dieu. » C’est lui le premier qui nous a aimé, c’est lui l’Éternel, le Tout-puissant qui s’est abaissé jusqu’à nous pour nous demander d’entrer en amitié avec lui, de nous laisser aimer par lui et répondre à son amour de notre mieux. Et c’est en conséquence de ce premier pas fait par lui qu’il nous demande, de faire de même, et de désirer nous aussi entrer en amitié avec tous nos frères et sœurs, de faire de notre mieux pour que notre fraternité soit réelle, qu’elle s’enracine en son amour, se nourrisse de lui et que nous apprenions de lui à entrer en amitié les uns avec les autres à sa manière.
« Demeurez dans mon amour. Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour… Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite…. Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. »
Dans ces mots Jésus a tout dit, tout dit du désir et du projet de Dieu pour l’humanité et pour chacune et chacun de nous, tout dit aussi du chemin de la joie qu’il veut nous donner. Car c’est bien dans cette amitié avec lui et avec nos frères et sœurs que nous trouverons la vraie joie, celle qui dure toujours et que rien ne pourra nous enlever, seule capable de nous combler.
Que Dieu nous donne cette joie en abondance.